On m’a demandé plusieurs fois quels tests d’orientation ou de personnalité j’utilisais dans mes accompagnements à l’orientation. Il s’agissait d’une évidence : j’utilisais forcément au moins un test pour permettre aux adolescents de mieux se connaître ou de déterminer quel métier leur correspondait.
Hé bien la réponse est AUCUN. Je n’utilise aucun test pour mes accompagnements. Je dirai même que je refuse de les utiliser. Non pas parce qu’ils relèvent du charlatanisme – certains ont des bases scientifiques sérieuses – mais parce que la forme même du test est hautement discutable dans ce domaine et, par conséquent, son efficacité également.
J’irai même plus loin, je trouve que les tests peuvent être contreproductifs, qu’ils ont tendance à enfermer les ados dans des cases desquelles ils auront du mal à se libérer et qu’ils n’aident en rien à développer l’esprit critique.
Adolescence et esprit critique
L’adolescence est une étape absolument primordiale dans notre développement. Celle pendant laquelle se construit, entre autres, notre esprit critique. Les transformations qui s’opèrent alors dans notre cerveau permettent progressivement de mettre en rapport les informations (celles qui viennent de nos ressentis et celles qui sont extérieures à nous), d’interroger l’origine et la subjectivité de ces informations et finalement de faire des choix en intégrant toutes ces données.
Bien entendu ça ne se fait pas tout seul d’un claquement de doigt ! ça prend beaucoup de temps. Mais surtout, plus les circonstances vont le demander plus notre cerveau va développer cette capacité. A mon sens, faire un test ou remplir un QCM dont les questions sont généralement sorties de tout contexte, n’aide pas à développer son esprit critique. On remplit les réponses et on a les résultats sans nécessairement pouvoir faire de lien plus précis. Il s’agit pourtant de l’occasion idéale pour développer l’esprit critique ! Car un choix comme celui de l’orientation nécessite de l’utiliser pour ne pas le regretter plus tard.
On coche des cases pour qu’on puisse nous faire rentrer dedans ensuite
Lorsqu’un ado veut passer un test d’orientation ce qu’il attend, ce qu’il ou elle espère en tout cas c’est qu’on lui donne une réponse scientifique, et donc forcément fiable, à ce questionnement important : pour quel métier suis-je fait ? Quelle est ma place, celle qui me correspondra et me rendra heureux professionnellement parlant ? Les résultats de ce test sont alors vus comme une vérité scientifique : tu es comme ceci, tu es fort dans cela, etc … donc tu es fait pour tel type de métier. Peut-être ne voyez-vous pas a priori le problème à cela.
Le problème c’est qu’une personne ne montre pas forcément les mêmes traits, les mêmes envies, les mêmes capacités dans les mêmes circonstances et qu’elle évolue tout au long de sa vie et PARTICULIÈREMENT pendant l’adolescence. C’est LA période pendant laquelle on se cherche puis on s’affirme (ça peut aussi arriver à d’autres moments de la vie bien sûr mais celui-ci est indispensable). Imaginez si un jeune se dit « Bon ben voilà c’est plié : je suis comme ça » et qu’il ne s’autorise alors plus à sortir de cette description, à moins de se trahir. Malheureusement cela arrive beaucoup trop.
Certains m’objecteront que les tests ne sont pas faits pour donner des réponses mais des pistes de réponse, qu’ils sont réalisés par des personnes compétentes qui vont expliquer que ce n’est qu’une description à un instant T ou encore que les résultats peuvent justement apporter davantage d’informations qui nourriraient l’esprit critique.
Mais là encore il faut tenir compte du contexte : ce sont des ados perdus et/ou angoissés et/ou manquants de confiance en eux qui vont s’en remettre à une source extérieure pour les éclairer sur une chose dont ils ne se sentent pas capables : faire un choix. Est-ce qu’ils entendent bien la nuance entre « réponse » et « piste de réponses » à ce moment-là ? qu’ils l’intègrent alors que plein d’émotions pas super positives tourbillonnent dans leur tête ? Probablement pas. Ils vont rester sur la vision qu’ils se font du test car ils ont besoin de certitudes. Le meilleur moyen de contourner cela serait plutôt de leur redonner confiance dans leur capacité à faire des choix.
Des tests parfois totalement inadaptés
Dans le cas des profils neuro-divergents ou neuro-atypiques (choisissez le terme que vous préférez), ces tests sont tout simplement inadaptés et donc pas du tout fiables. Pour parler des profils zèbres / HPI / multipotentiels dont je suis spécialiste, ces tests sont même assez catastrophiques.
De manière générale, ces profils et les QCM ça ne matchent pas beaucoup. Parce l’énoncé peut être compris de plusieurs manières et qu’on ne sait pas laquelle est la bonne. Parce qu’on aurait envie de nuancer, de dire « ben ça dépend ! » quand il n’y a pas de contexte assez précis. Cela a pour effet de créer un grand sentiment de frustration, d’incompréhension et de rejet voire d’échec.
Sans compter que les tests d’orientation sont faits pour la majorité, donc les neurotypiques qui n’ont pas du tout ni le même fonctionnement, ni les mêmes problématiques. Il ne s’agit donc plus uniquement de la forme mais de tout le fond qui est inadapté.
Les tests pour ces profils-là c’est tout simplement NON !
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Vous penserez peut-être « C’est super de critiquer les tests mais on utilise quoi à la place ? Le but c’est quand même d’aider les ados, pas de les laisser livrer à eux-mêmes. » Et vous aurez tout à fait raison !
En tenant compte des particularités du raisonnement à l’adolescence ainsi que des émotions parfois paralysantes que suscitent les questions d’orientation, j’ai développé des outils ludiques immersifs (jeux de rôle sur table et escape games notamment) qui permettent d’apprendre à faire des choix conscients et pertinents pour son avenir en faisant un pas de côté, en expérimentant et en exerçant son esprit critique.
Si cela vous intéresse, je vous invite à regarder ceci.
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En attendant je vous souhaite plein de jolies citrouilles en cette période d’Halloween !